Tragédie dans la Grande Famille

 


                                 Tragédie dans la Grande Famille 


Que reste-t-il de la grande famille qui fût celle de Yav I'Tembu Kanyingan Pa Mbund? Que des tragédies l'ont frappée depuis que Yav est mort de ses blessures lui infligé par un crocodile! Quelqu'un se reconnaît-il de sa descendance?


                            Mukalabul--Un Indomptable

Introduction

Mukalabul a fait beaucoup pour sa famille et pour la capitale de l’empire Lunda (Aruund). Il était bien connu à Musumb, surtout à Mukan. Il a connu des aventures et des mésaventures dignes d’un roman ! Ses frères et sœurs se sont aussi éteints laissant une grande progéniture. Tous les membres survivants de sa grande famille ne se connaissent pas. 

Ainsi, à l’ère de l’information, le monde étant devenu un village planétaire, réuni sous la toile, il est possible de se retrouver. D’où je prends l’initiative de poster ce message que vous pouvez compléter. 

L’homme

Mukalabul est le sobriquet lui collé par l’administration coloniale. Il dérive du Swahili, -kaa bure (ikala bule), Mkaa-bure, Mwikalabule, voulant signifier fainéant ! L’était-il vraiment ? Qui était-il ? Qu’a-t-il fait ? Ma mémoire me rappelle certaines choses.

Ses parents (Yav ‘Itembu et Kon Nayibalakat) l’ont appelé Mukaz Chinyam. Il s’est donné lui-même d’autres noms, dont : Dikalandosh, Sachipap Iyemb Kakuny Kakudila Kwayen, Sampas. Comme il n’avait pas de sœur de même père et même mère, il aimait qu’on l’appelle aussi « Oncle [Mantu, dans sa langue]». 

Un fait exceptionnel, c'est qu'il n'était ni chrétien ni animiste. C'est seulement lorsqu'il est très faible, malade, qu'il se ferait "baptiser" chez les Méthodistes à Kolwezi et que l'on lui donnerait le prénom de Charles. À son retour de Kolwezi, je ne l'ai jamais vu fréquenter l'église. Il a aimé cependant le livre "Du paradis perdu au paradis reconquis" publié par les Témoins de Jéhovah. Lorsque le je quitte--pour ne plus le revoir--en juin 1976, il allait parfois à la Salle du Royaume. 

Il a épousé plusieurs femmes dont la majorité n’ont pas fait longtemps chez lui. Celles dont je connais et dont on m’a parlé sont : Maruv, avec laquelle il a eu Mafik, Kon et Chiteng, et Nakabamb Mankand de laquelle lui sont nés Machik, Ngomb, Chibamb, Mukaz, Nawej, et Munon. Cette dernière a quitté avec une grossesse. Les survivants au moment où ce récit est composé sont Ngomb (à Musumb) et Nawej (le voyageur). Mais il y a un grand nombre de petits et arrières-petits fils et petites-filles.

Il me disait que son père Yav était un chef et guerrier. Sa mère, Kon, fut une femme très forte, qui faisait la chasse, la pèche et qui construisait des maisons. Elle accompagnait son mari au front. C’est lors de l’une de ces campagnes, donc au front, qu’est né Mukaz Chinyam. On le faisait boire dans le crane humain ! 

Fils unique de sa mère, il a eu des frères et sœurs (demi-frères et demi-sœurs, selon la civilisation occidentale), 80 environ. Ils sont restés seuls à la mort des parents, et c’est Mukalabul qui s’en est occupé. De tous ceux-là j’ai connu seulement Fatak Nkand’bal (Sandoa, village Fatak, entre Kandjangu et Sawamba) Namansang Mpung (Lubumbashi), Kamwangen, Yav Chinawej (Kipushi), Mudizu. Tous sont décédés, sauf le dernier qui serait à Mulambu. Je n’ai pas pu le rencontrer lors de mon dernier voyage à Musumb en 2006.

Du côté de sa mère, il y a eu Nambal, Ngomb, Kanyimbu, Muteb que j’ai connus.

Il était un homme très fort, aimant et pratiquant la lutte, couturier, maçon, charpentier, chasseur. Un homme social, au sens d’humour très élevé, mais qui ne tolérait aucune forme d’injustice ni de domination, intrépide, courageux au parler franc. On dit de lui qu’il ne craignait personne. Il était aussi d’une grande générosité. 

Sa force physique est légendaire. Je me rappelle qu’une fois une femme m’a vu à Sandoa. Elle m’a demandé de qui j’étais le fils. Ayant su qui était mon père, elle me dit : « J’espère que tu n’es pas comme lui !» « Pourquoi ?, ai-je demandé.» Elle dit : « Ton père était très fort, un homme qui pouvait jeter un autre homme comme on lance une pierre !»

Ses démêlées avec l’administration belge 

L’Administrateur du territoire de Kapanga avant l’indépendance a eu fort affaire avec lui. Mukalabul n’acceptait pas qu’on lui impose la superficie à cultiver, la période pour la chasse, autant qu’il n’aimait pas que cet Administrateur soit porté sur le chipoi (tshipoyi). 

Il aimait faire des grands champs. Il nous racontait qu’un jour un agronome belge passait par son champ. L’ayant vu de loin, il a grimpé sur un arbre. Le belge lui a demandé de descendre, il lui a dit qu’il savait comment monter, mais qu’il ne savait pas comment descendre !

Un autre jour, il a vu le belge transporté sur le chipoi. Il a arrêté le cortège et demandé au « blanc » de descendre et de marcher, car il était inadmissible qu’un adulte bien portant soit ainsi porté par les autres. Il a déchiré le chipoi et dispersé la foule. 

Karindjindj : Son arme de chasse, le pupu, il l’a appelé Karindjindj. L’un de ses chiens s’appelait Jinsang Ja Urel (les nouvelles du soir, voulant signifier que ce qu’il pouvait dire et que l’on contesterait le matin, sera accepté et vérifié au soir). C’étaient ces vrais gardiens. Ils ne toléraient pas que quelqu’un vienne à rencontre avec des bâtons. Les chiens réagissaient tout de suite pour protéger leur maître. Ils pouvaient parfois faire seuls la chasse et ramener le gibier à la maison. Ils pouvaient protéger les marmites sur le feu contre les autres chiens ou les poules. 

Avec le Karindjindj nous (les enfants, sa maisonnée, ses voisins) pouvions manger de la viande. 

Il fut une fois arrêté, avant ma naissance, pour avoir enfreint l’interdit de chasser à une certaine période. Amené chez l’Administrateur du territoire et interrogé, il avait son Karindjindj sur l’épaule, et la main dans la poche. L’Administrateur a trouvé cela offensant. Demandé d’expliquer pourquoi il fait la chasse pendant la période interdite, il dit : « Vous autres, les Blancs, êtes venus avec le cheval, le chat et le chameau. Dites-moi, lequel de ces animaux ai-je tué ? En plus, depuis nos ancêtres, nous nous nourrissons de la chasse. Nous n’avons pas exterminé les animaux. Quel est l’oncle de la gazelle ou de l’antilope qui est venu m’accuser qu’il nous a exterminés ? Je suis un chasseur, à la recherche de la nourriture pour ma famille. Ai-je le temps de vérifier de loin et savoir que telle bête est femelle ou male avant de tirer ? » 

L’Administrateur a ordonné qu’on l’arrête. Il est parti demandant au plus fort de le suivre et de l’arrêter. Rien ne fut fait ce jour-là.

Le lendemain, très tôt matin, on lui envoya un peloton des militaires pour l’arrêter. Ce fut une bagarre terrible. Des soldats ont eu qui le bras cassé, qui la jambe, qui les dents ! 

Exile 

Du fait de l’ampleur, l’Empereur, Mwant Yav Kaumb, lui dit : « Ce que tu as fait est terrible. Ces gens vont te tuer pour rien. Le territoire de l’empire est vaste. Tu peux aller ailleurs en attendant que ce Monsieur s’en aille ou qu’il meure. Quand ils vont me demander, je veux leur dire que tu étais fou et que nous t’avions traité dans l’enfance et que cela refait surface de temps en temps. » 

Il dit au Mwant Yav : « Pour cette fois-ci, je t’écoute. Je m’en vais. »

Il prit la direction de l’Angola d’où il fut venir ses femmes, Maruv et Nakabamb Mankand, qui accouchèrent le même jour, donnant naissance à Chiteng et à Ngomb. D’où il va s’appeler Sampas (père des jumeaux). C’est ici où il se perfectionna en couture après avoir travaillé dans l’atelier d’une couturière portugaise. 

Retour à la capitale

Lorsqu’il apprit que l’Administrateur qui lui créer des problèmes n’était plus, il revint au Congo et se réinstalla d’abord à Musumb, puis à Sampemb près du village de son père, Mulambu, à Kanej (vers 1959/60) à l’encouragement de Mwant Yav Ditend pour être Mwin Kanej (Chef, sultan). Il tomba malade et revint à Musumb pour se faire soigner. Il entreprit la culture des champs, la construction de la maison. Toutes les femmes l’ayant quitté, les enfants aussi, nous ne sommes restés qu’à trois : le papa, le neveu Mukaz (fils jumeau de Mafik) et Nawej (l’auteur de ce récit).

Au déclin de sa vie

Son état de santé exigeant des soins plus appropriés, il parti pour Kolwezi chez son frère Mashitak Kamweny. C'est pendant le séjour à Kolwezi qu'il se fait "baptiser" chez les Méthodistes, qui le prénomment "Charles". Un peu rétabli, il revint à Musumb. Je ne l'ai pas vu aller à l'église.

Dans ces entrefaites, pour essayer de poursuivre les études, je me déplace pour Sandoa chez papa Fatak, revint à Musumb pour répartir pour Kolwezi chez Machik. 

Après m’être installé, nous (Machik et moi) fûmes venir Mukalabul à Kolwezi. Il s'est intéressé au livre Du Paradis perdu au Paradis reconqui publié par les Témoins de Jéhovah. Quand il le pouvait, il se rendait à la Salle du Royaume. 

Parti avec son histoire

En juin 1976, je fus appelé à Kinshasa pour une mission spéciale. Je l’ai laissé malade. Il a tellement pleuré que je ne l’ai jamais vu ainsi. Malheureusement, en octobre 1976, Mukalabul s’est endormi dans la mort, après 4 mois de séparation.

Il y a beaucoup d’éléments qui manquent à ce récit. 

Par exemple, du fait des circonstances, je n’ai pas vécu longtemps aux côtés des parents pour en savoir plus sur leur arbre généalogique. 

Certains de mes cousins, cousines, frères et sœurs, connaissances, j’ose l’espérer, qui peuvent lire en ligne ce message et s’y reconnaissent, peuvent me contacter et compléter notre histoire, réunir, si possible, la grande famille de Yav ‘Itembu Kanyingan Pa Mbund.

Reconstituons notre histoire

J’ai besoin de savoir ce que vous savez autant que vous pouvez tirer de moi ce que vous ne savez peut-être pas. 

Loin s’en faut, il n’était pas fainéant pour mériter le sobriquet de Mukalabul (Mkaa Bure), mais il l’a accepté. Il n’aimait pas la fainéantise qu’il a combattue avec toute sa vigueur et sa rigueur. Il était un travailleur acharné, soucieux du bien-être de tous. 

Leçons

La première que je tire personnellement concerne l’importance de réunir la famille. À la disparition de leurs parents, nos pères et mères se sont réunis autour de leur grand frère. Le défunt Yav, me présentant à son fils, a dit : « Voici ton frère. C’est son père qui m’a marié ! » Je sais aussi que Yav avait entrepris de noter les noms de tous les membres de la grande famille dans un cahier. Ce cahier, que j’aimerais consulter, doit se trouver parmi les objets du défunt. 

Par David Nawej

Première mise en ligne, Septembre 2008

De Midrand (Johannesburg), en Afrique du Sud

Mise à jour, le 12 septembre 2009 (Londres, Engleterre)

Publié par CD Nawej à 17:53 Aucun commentaire: Liens vers cet article   


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